22 Août, en région parisienne : une odeur de feuilles mouillées flotte dans l’air qui s’est rafraichi. Ce n’est plus tout à fait l’été mais pas encore l’automne. Ce n’est plus tout à fait les vacances mais pas encore la rentrée. Et cette émotion mi-figue, mi-raisin, m’incite à écrire cet édito sur un mode plus personnel qu’à l’habitude.
J’ai encore en tête les belles images du mois de juillet à Avignon. Ce sont celles d’une association dynamique, profondément humaine, diverse, variée, talentueuse, souriante, émouvante, reconnue comme une interlocutrice importante -sinon majeure- par tous ses partenaires et par tous ses membres : un petit état de grâce, une douce trêve estivale hors du temps, sinon de l’espace.
Je remercie chaleureusement toutes et tous, partenaires, membres du bureau et du conseil d’administration, adhérentes et adhérents, salariées et stagiaire, et nos chères délégations pour avoir contribué de près ou de loin à ce sentiment d’accomplissement dans l’exercice de notre art, le théâtre.
Parmi tous les spectacles que j’ai vus, celui qui m’a le plus ému, le plus bougé, est sans conteste Les Voiles écarlates de Stéphane Titelein, compagnie Franche Connexion. Son argument est magnifique : « Et si je pouvais offrir à mon père la victoire de son engagement ? » ou comment convaincre son père mourant que le PCF a enfin remporté les élections…
Dans le grenier d’une maison familiale, un fils fait le bilan de la vie militante de son père, et se lance dans le récit des luttes passées, des souvenirs vaporeux de l’enfance, de la colère immense et fière de l’ouvrier. Un vent d’espoir se lève, gonfle les voiles écarlates du rêve, et bâtit un rempart non pas contre la mort mais contre le fatalisme.
Le théâtre est un art éminemment politique, opposant par nature du pouvoir en place : il interroge sans concession la réalité du monde et prend acte des noirceurs et lumières de l’âme humaine, tout en offrant l’espoir d’un « meilleur », en rassemblant acteurs et spectateurs.
En cette fin de mois d’août, dans une curieuse nostalgie de l’enfance (et même, soyons fous, de ses devoirs de vacances), je suis fier, honoré, heureux, de présider aux luttes des E.A.T pour la sixième saison consécutive, et je nous souhaite de l’encre dans nos stylos, des feuilles blanches et écarlates sur nos bureaux, de la force dans nos bras, de l’air dans nos poumons afin de transformer nos colères et indignations en textes et actions fécondes, sans pour autant oublier de rêver, ni de nous rassembler.
Vincent Dheygre, président des E.A.T