Au-delà de cette limite votre Pass n’est plus valable.
Imaginez une classe de Seconde entendant au mois de septembre « nous avons de quoi nous occuper pour l’instant mais c’est promis, dans le courant de l’année nous ferons telle sortie, rencontrerons telle autrice, ou mettrons en place tel atelier… » Imaginez l’équipe pédagogique en devoir d’expliquer aujourd’hui qu’elle ne fera rien, ne rencontrera personne, n’ira nulle part.
Imaginez le prof de maths dictant l’énoncé suivant : « Sachant que chaque élève dispose chaque année de 30 € de part collective du Pass Culture, comment expliquer l’épuisement des crédits au 1er février ? »
Ces temps-ci, nous avons pris le pli de regarder les événements au travers d’un prisme dystopique, pourtant le scénario ne tient pas debout. Puisque chaque établissement « dispose d’un crédit de dépense attribué annuellement sur la base de ses effectifs » (1), comment un tel dérapage budgétaire peut-il se produire ?
Quand bien même une variabilité découlerait du différentiel entre des effectifs calculés par année scolaire et des crédits dévolus par année civile, le mystère reste entier. Puisque chaque établissement connaît son plafond de part collective pour l’année scolaire, la situation dans laquelle nous sommes plongés ne devrait pas avoir lieu : les établissements sont-ils réellement dotés des moyens que la S.A.S Pass Culture leur fait miroiter, ou bien une certaine marge de « non recours » à la part collective est-elle nécessaire ? Une marge déjà très insuffisante en 2024 puisque le budget prévisionnel de la part collective a été dépassé de 40% ?
Certes le champ des offres collectives est vaste (2) et la liste est longue des activités entrant dans son périmètre (ateliers, représentations, concerts, projections, rencontres, visites, conférences, festivals, salons), il n’en demeure pas moins que le « sauve qui peut » de fin janvier échappe à l’entendement. Le tour de « Pass Pass » ne passe pas, tout comme la façon dont certaines offres sont subitement devenues « non conformes » dans les jours qui ont suivi. Non conformes à quoi, au juste ? À une situation de pénurie dans laquelle plus rien ne peut fonctionner sans heurt. Une fois de plus, le ministère concerné, celui de l’Éducation Nationale, laisse rimer sidération et déconsidération. Une fois de plus l’action artistique se voit ravalée au rang de gadget, de joujou qu’on peut confisquer séance tenante, « non essentialisée » jusqu’au bout, en somme.
(1) Vademecum part collective sur le site éduscol : « Chacun des établissements scolaires bénéficiaires du dispositif dispose d’un crédit de dépense. Ce crédit constitue sa dotation de part collective du pass Culture. Il est consommable au titre de l’année scolaire en cours uniquement (entre le 1er septembre et le 31 août). »
(2) Arts visuels, culture scientifique, lecture, écriture, spectacle vivant, cinéma, audiovisuel, mémoire, musique, patrimoine…
David Ruellan, auteur E.A.T